« Le premier devoir d'une République est de faire des républicains ; et l'on ne fait pas un républicain comme on fait un catholique. Pour faire un catholique, il suffit de lui imposer la vérité toute faite. Le maître a parlé, le fidèle répète. Il a été dit un catholique ; mais on pourrait tout aussi bien dire un protestant ou un croyant quelconque […]. Toute éducation cléricale aboutit à ce comportement : croire et obéir, foi aveugle et obéissance passive […].
"Pour faire un républicain, il faut prendre l'être humain si petit et si humble qu'il soit (un enfant, un adolescent, l'homme le plus inculte, le travailleur le plus accablé par l'excès de travail) et lui donner l'idée qu'il peut penser par lui-même, qu'il ne doit ni foi ni obéissance à personne, que c'est à lui de chercher la vérité et non pas à la recevoir toute faite d'un maître, d'un directeur, d'un chef quel qu'il soit, temporel ou spirituel.
Est-ce qu'on apprend à penser comme on apprend à croire ?
Croire, c'est ce qu'il y a de plus facile ; et penser, ce qu'il y a de plus difficile au monde. Pour arriver à juger soi-même d'après la raison, il faut un long et minutieux apprentissage ; cela demande des années, cela suppose un exercice méthodique et prolongé.
C'est qu'il s'agit de rien moins que de faire un esprit libre. Et si vous voulez faire un esprit libre, qui est-ce qui doit s'en charger sinon un autre esprit libre ? Et comment celui-ci formera-t-il celui-là ? Il lui apprendra la liberté en la lui faisant pratiquer […].
Il n'y a pas d'éducation libérale là où l'on ne met pas l'intelligence en face d'affirmations diverses, d'opinions contraires, en présence du pour et du contre, en lui disant : Compare et choisis toi-même ! ».
Ferdinand Buisson, directeur de l'enseignement primaire de 1879 à 1896, député radical-socialiste, fondateur de la Ligue des droits de l'homme au congrès de 1903 du parti radical, et Co-Prix Nobel de la Paix en 1927, avec Ludwig Quidde.
Les règles étaient déjà là, les hussards avaient bâti un système simple et limpide. Mais que s’est il passé pour en arriver à ce que l’on vient de vivre ?
Communiqué officiel de la F.A.L.
Cher.e.s Ami.e.s,
En ces circonstances dramatiques, nous nous adressons solennellement à vous, responsables d’associations membres de la Ligue de l’enseignement.
En effet, le lâche assassinat, par un terroriste islamiste, vendredi dernier d’un éducateur a nécessité une réaction et une mobilisation immédiate de notre Mouvement. C’est ce à quoi nous nous sommes attelés en réagissant par un communiqué dès vendredi soir, en contribuant ensuite activement à l’écriture de communiqués de collectifs dans lesquels la Ligue est très présente (le CNAL et le CAPE).
Nous avons enfin, dans le cadre d’un large appel des forces syndicales, associatives et politiques attachées à la Laïcité, mobilisé rapidement pour des rassemblements ce dimanche dans les départements ainsi qu’à Paris, place de la République.
Si cette mobilisation s’est faite dans l’urgence pour dire notre effroi, notre solidarité avec les enseignant.e.s et notre détermination face aux terroristes et aux tenants de l’obscurantisme, nous savons que faire de l’École une véritable École de la République œuvrant à la réussite de tous les enfants et faire comprendre et partager le principe de laïcité sont des combats de longue haleine qui vont de pair avec la lutte contre les inégalités. Nous savons également que le risque est grand de voir les adversaires de la République laïque et sociale se saisir de la légitime émotion populaire pour stigmatiser une partie de la population. Nous faisions déjà part de nos craintes en septembre dans un communiqué sur les séparatismes. Nos craintes sont amplifiées suite à cet acte barbare.
Cette mobilisation dans la durée doit se traduire à la fois par une grande fermeté face à ceux qui considèrent que les lois de leurs Dieux sont supérieures aux lois de la République et par des politiques publiques qui luttent efficacement contre les relégations et les injustices sociales. Elle passe par un soutien de toute la Nation à son Ecole Publique et Laïque et à ses agents que sont les enseignant.e.s.
Elle passe aussi par un travail au quotidien et sans relâche de nos associations d’Education Populaire membres de la Ligue de l’enseignement, complémentaires de l’Ecole Publique, qui sont au carrefour de l’Ecole et des temps de loisirs ou de l’éducation informelle.
Nos associations souffrent aujourd’hui de la crise sanitaire après avoir subi des années de désengagement de l’intervention publique (baisse de subventions, suppression des emplois aidés,…). L’énergie de leurs dirigeants est trop souvent absorbée par la lutte pour la survie.
Pour autant, notre responsabilité collective est grande.
Seul réseau à pouvoir compter 25 000 associations et 1,3 million d’adhérents, nous avons la possibilité d’irriguer, sur tous les territoires de France métropolitaine et d’outre-mer, de manière volontariste, les valeurs qui nous fondent. Seul Mouvement laïque présent dans un tel nombre de communes, de quartiers, dans l’Ecole ou à sa proximité, nous avons la possibilité de contribuer au rassemblement des forces qui peuvent s’unir, dans le cadre d’une Alliance renouvelée entre société civile et pouvoirs publics, aux niveaux local intercommunal, départemental, régional et national pour développer les initiatives qu’il importe de prendre dans les semaines et les mois qui viennent pour contrer les tentations du repli sur soi et de la haine de l’autre.
Les échelons national et départemental de la Ligue de l’enseignement prendront toute leur part à cette dynamique en mettant à disposition les outils utiles à cette fin (argumentaires, propositions de projets à mettre en œuvre localement, outils de décryptage, programmes d’engagement,….).
Notre mobilisation doit être à la hauteur de l’enjeu.
Bien cordialement,
Michèle ZWANG-GRAILLOT - Présidente nationale
Lucette Vigne - Présidente de la fédération Corrèze
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